Chaque année en juillet, l’organisme Fashion Revolution publie son index de transparence [1]. Il s’agit d’une étude qui mesure l’impact de la production, tant au niveau social qu’environnementale, de 250 grandes marques de vêtements en analysant les politiques et les pratiques que ces entreprises ont mises en place au sein de leurs opérations. Parmi elles, on retrouve Zara (Inditex), Patagonia ou encore Gildan.
Par la même occasion, juillet marque pour nous le passage à la nouvelle année fiscale : L’occasion parfaite pour nous d’analyser les chiffres de la précédente, et de planifier celle à venir.
Pourquoi c’est important ?
Plus que jamais, il est urgent de prendre des mesures radicales pour réduire notre impact sur l’environnement, et de fait, pérenniser la vie des êtres vivants sur la planète.
Mais comment s’améliorer et investir en des pratiques durables si on n’a aucune idée des différentes étapes et personnes impliquées dans la fabrication de nos vêtements ?
Bien souvent, quand la mention « fabriqué au Canada » est apposée sur un vêtement, seules les étapes de coupe et de couture sont prises en compte. On oublie bien souvent toutes les étapes qui mènent à la fabrication du tissu. Or, le tissu compose la majeure partie du vêtement.
Pendant longtemps, les marques ont choisi de cacher les informations concernant leur production pour maximiser les profits. On parle ici de l’origine des matériaux, de leur transformation, des pays de fabrication, des produits chimiques utilisés, de la gestion des déchets mais aussi des conditions de travail et du salaire des employé•es.
Les politiques gouvernementales leur ont permis (et leur permettent encore) de le faire puisqu’aucune loi à ce jour n’oblige les marques à rendre ces informations publiques. Cependant, tel que mentionné dans notre dernier article sur la fabrication éthique, plusieurs projets de loi sont en cours d’évaluation aux États-Unis et en Europe.
Selon l’index de transparence 2022 de l’organisme Fashion Revolution, 50% des grandes marques de vêtements publient très peu ou pas d’information sur leur chaine d’approvisionnement.
Or, la transparence est un élément essentiel pour l’amélioration des pratiques et le partage des connaissances. Elle permet également de mettre en place des actions concrètes pour produire de façon plus durable.
En 2020, les fibres synthétiques (polyester, spandex, nylon, …) représentent 62% du marché. Les experts estiment que cette part pourrait atteindre 45% d’ici 2030. Sur les 26,2% que représente le coton, seulement un tier représente les cotons plus durables (GOTS, Better cotton, Fairtrade…)[2].
Et Montloup dans tout ça ?
C’est le nombre de mètres total que l’on a produit au cours de notre exercice financier 2021/2022.
Analyse
100% de notre activité de tricotage est basée à Montréal et la totalité des activités de teinture et de finition sont faites en Ontario. 100% des personnes qui travaillent dans ces étapes clés sont payées à minima au salaire minimum pour les débutants du secteur. Les travailleur•ses les plus expérimentés ont des salaires plus attractifs. Les normes de santé et de sécurité sont également respectées.
Les étapes que l’on doit améliorer sont la production des fibres et leur transformation en fil (filature).
Pour tous nos fils de coton certifiés GOTS, les travailleur•ses doivent avoir des conditions qui répondent aux normes de l’organisation mondiale du travail (sécurité, salaire, congés, …). Il en va de même pour les fils fabriqués aux États-Unis. Pour s’en assurer, nous planifions visiter les entreprises avec lesquelles nous travaillons au cours de la prochaine année.
Pour les fibres de viscose de bambou ou de chanvre, nous n’avons aucune possibilité de nous assurer des bonnes conditions de vie des employé•ees. Pour pallier ce problème, nous cherchons activement des alternatives à la viscose de bambou ou de nouveaux fournisseurs permettant d’offrir une traçabilité et des informations sur leurs méthodes de production. Aucun investissement en des fils de chanvre provenant de la Chine ne sera fait dans les prochaines années. Si la piste du chanvre reste à explorer, on priorisera un approvisionnement européen.
Parmi eux ces 25500m de tissus…
54.6%, c’est la part de coton biologique certifié (GOTS, OCS ou USDA Organic).
On remarque une part importante de coton régulier (22.6%).
Cela s’explique par deux facteurs :
- La pénurie de coton biologique à laquelle nous avons fait face en 2020 et 2021 (voir notre article Tendre vers le mieux - Les problèmes d'approvisionnement de la filière bio). La quasi-totalité de nos fils de viscose de bambou étaient mélangés à du coton régulier.
- Jusqu’à très récemment, pour certaines polaires et french terry épais (13 oz et plus), nous n’avions pas le choix d’utiliser du coton régulier des États-Unis pour atteindre l’épaisseur voulue. Depuis peu, notre atelier de fabrication a fait l’acquisition d’une nouvelle machine à tricoter permettant de palier à ce problème. Nous avons également fait l’acquisition de fils plus épais auprès de notre filature américaine. Reste encore à convaincre nos client•es de les utiliser !
La laine Rambouillet des États-Unis fait aussi son apparition sur le graphique. Elle représente 1.2% de notre production, ce n’est pas beaucoup mais il faut bien commencer quelque part !
Concernant l’origine des fibres, on remarque une diversification de l’approvisionnement. En effet, jusqu’en 2020, 100% de nos fils provenaient d’Asie. On est très fières aujourd’hui de voir que presque 50% des fils utilisés en 2021/2022 provenaient d’autres pays dont 21% du continent américain (États-Unis et Pérou).
Qu’est-ce qu’on veut pour la suite ?
Il est important de se rappeler que parler de transparence, c’est aussi montrer les bons comme les mauvais côtés pour permettre de s’améliorer.
Dans l’idéal, nous aimerions nous éloigner de la viscose de bambou pour n’offrir que des matières 100% naturelles. (voir article Profits/Façons de faire/Slow business). Force est de constater que ça n’arrivera peut-être pas de ci-tôt.
Pourquoi ?
Parce que certain•es de nos important•es client•es utilisent encore cette fibre pour sa douceur et sa souplesse. Faire le choix de retirer complètement ce fil de nos productions reviendrait à perdre une grande partie de notre clientèle. En tant que petite entreprise, nous ne pouvons malheureusement pas nous permettre de perdre cette clientèle qui nous assure un revenu, et de fait, nous permet de poursuivre nos activités. Cependant, c’est par des articles tel que celui-ci et bien d’autres qu’on espère faire changer les mentalités et inciter nos client•es à faire des choix plus durables.
[1] https://www.fashionrevolution.org/about/transparency/
[2] https://textileexchange.org/wp-content/uploads/2021/08/Textile-Exchange_Preferred-Fiber-and-Materials-Market-Report_2021.pdf